Les orchidées et l’hydro-culture


Dernière m.a.j. 3 Décembre 2006

Beaucoup des orchidées tropicales que nous cultivons à la maison sont des plantes épiphytes. Ce terme indique que dans la nature, elles vivent en hauteur, accrochées sur les branches des arbres à la recherche de la lumière. Le substrat sur lequel elles vivent, quant il y en a, est alors bien différent de celui des plantes terrestre. Il est essentiellement composé de mousse, feuilles mortes et autres matériaux à divers stades de décomposition, et est en général très drainant (ce qui veux dire qu’il retient assez peu l’eau). Dans certains cas il n'y a pas de substrat du tout: les racines nues sont simplement accrochées à l'écorce sans aucune protection. 

Lors de la période de croissance des orchidées, il pleut généralement quotidiennement dans leur environnement naturel. Les orchidées ont donc toute l'eau qu'il leur faut pendant cette période ou elles en ont le plus besoin. Cependant le substrat (quant il y en a) sèche rapidement entre 2 pluies et reste très aéré, même avec cette pluviométrie abondante. 

Les orchidées épiphytes ont des racines parfaitement adaptées à ces apports d'eau ponctuels. Elles sont recouvertes d’une gaine absorbante qui ressemble a une éponge(le velamen) et qui leur permet de capter l'eau chargée de nutriments qui ruisselle lors des pluies. Quant il pleut le velamen se gorge d'eau et cette dernière est alors emmagasinée autour de la racine pendant quelques heures, le temps que l'orchidée s'abreuve et absorbe ce dont elle a besoin pour pousser.

Racine d'un Phalaenopsis. La partie blanche s'appelle le Velamen et agit comme une éponge qui emprisonne l'eau et les nutriments autour de la racine.

Ce Guaranthe aurantiaca est cultivé racine nue sur un faux arbre en liége dans les serres du jardin botanique de Montréal.

En culture, c'est toute une autre histoire surtout quant on ne possède pas de serre et qu'on cultive sur un rebord de fenêtre. Peu d'entre nous cultivent leurs orchidées montées sur des morceaux de bois comme elles le sont dans la nature. Ce mode de culture exige  de maintenir un hygrométrie élevée autour des plantes et de les arroser quotidiennement en période de croissance, ce qui est pratiquement infaisable en dehors d'une serre ou d'un orchidarium. Enfin certains voudraient bien passer la journée à arroser amoureusement leurs orchidées mais ne peuvent point car leur patron exige qu'ils se rendent quotidiennement sur leur lieu de travail au lieu de rester tranquillement à la maison pour arroser avec un bon thé à la main, pffff.

La plupart des orchidophiles amateurs n'ont pas d'installation particulière pour abriter leurs orchidées et les cultivent donc en pot (tout ça à  cause du patron, franchement c'est pas raisonnable). Et c'est  la que tout se complique ! En effet les racines des orchidées sont des filles de l'air : Elles sont adaptées à un milieu de culture très aéré et en conséquence elles pourrissent dès lors que l'air qui les entoure n'est plus assez riche en oxygène.   

Or dès qu'on cultive en pot dans un substrat humide, une lutte sans merci pour l'oxygène se déroule entre les racines de la plante et les micro-organismes du sol (un vrai carnage c'est tafreux et nous on ne se doute de rien du tout !). Si le substrat est humide et riche en composés décomposables, les micro-organismes du sols se développent vitesse grand V et consomment tout l'oxygène disponible dans le pot ce qui asphyxie les racines de l'orchidée en moins de 2. 

Lorsqu'on cultive une orchidée épiphyte en pot il faut donc aérer le substrat au maximum et juguler le développement des micro-organismes décomposeurs. Pour ce faire on utilise des substrats constitués de très grosses particules et qui se décomposent lentement, comme par exemple des écorces de pin. Et surtout on fait passer ce substrat par des cycle humide / sec. En effet laisser sécher le substrat entre 2 arrosages permet de ralentir le développement des micro-organismes qui eux ont besoin d'humidité pour se développer. 

Tout semble très bien dans le meilleur des mondes. Si ce n'est que l'arrosage des orchidées en pot demande un certains doigté. Comme on l'a vu si le substrat est mal adapté ou si on ne le laisse pas sécher suffisamment entre 2 arrosages la sanction ne se fait pas attendre longtemps: Les racines pourrissent. Inversement si on arrose pas assez, la croissance de l'orchidée est ralentie.  Des études scientifiques récentes (et néanmoins ennuyeuses, donc je vous en épargne la lecture. Mais j'ai les noms donc si certains sont intéressés je peux balancer !) ont prouvé que le manque d'eau est le facteur qui limite le plus la croissance des plantes épiphytes, et ce bien avant le manque de lumière ou d'engrais. 

Dans l'idéal donc il faudrait que nos orchidées ai un un accès permanent à l'eau et aux nutriments pour être pleinement heureuses et pousser a leur plein potentiel (il leur en faut peuuuu pour être heureux, oui vraiment peu pour être heureuuuux...  vous connaissez pas ? revoyez vos classiques Disney).

Hybride primaire de Phalaenopsis cultivé en pot dans un substrat à base d'écorces de pin.

Mais comme on l'a vu, quant on cultive en pot dans un substrat à base d'écorces de pin il est impossible de le garder humide en permanence car cela ferait pourrir les racines. Et puis il reste le problème des membres de la secte des arroseurs fous dont, je l’avoue, j'ai autrefois fait partie (mea culpa). Cette catégorie d'individus dangereux est affligée d’une très rare maladie mentale qui fait qu’ils se précipitent chaque matin sur leur arrosoir et autres brumisateurs aux petites heures de l’aube. Le fait de saupoudrer quelques gouttes d’eau sur leur protégées chaque matin (voir plusieurs fois par jour pour les plus atteints) semble leur procurer une sorte de plaisir malsain. Cette maladie est hélas sans traitement connu à ce jour. 

A signaler également l'épineux problème des départs en vacances : Certaines voisines sont réticentes à l'idée de devoir suivre un stage d'apprentissage de 6 mois afin d'arriver à arroser vos 154 orchidées sans trop de dégâts lors de vos vacances : que voulez vous, ya des gens qui sont vraiment pas serviables de nos jour ma pov dame !

Heureusement, il existe un remède miracle pour soulager les orchidées de tout ces maux : c’est l’hydro-culture. Et si vous voulez savoir le pourquoi du comment du keskecé il vous suffit de sauter au paragraphe suivant : Elle est pas belle la vie ?

 

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Qu’est ce que l’hydro-culture ?


L’hydro-culture (parfois appelée culture semi-hydroponique ou S/H) est une méthode de culture sans sol. Ceci signifie que les plantes sont cultivées dans du substrat inorganique non-décomposable comme la laine de roche, la perlite, les billes d’argile expansé, la laine minérale ou la mousse horticole. Le substrat n’a plus alors aucun pouvoir nutritif en tant que tel : il est complètement non-décomposable et donc hostile au développement des micro-organismes du sol. Il sert uniquement à supporter les racines et a véhiculer les nutriments, qui eux sont contenus dans l’eau d’arrosage.

Il existe de nombreuses façons de cultiver en hydro-culture, mais je me concentrerais sur ce qu’on appelle l’hydro-culture passive. Cette technique consiste à utiliser le pouvoir absorbant que possède certains de ces substrats inorganiques pour alimenter la plante. On peut prendre l’exemple d’une plante verte rempotée dans des billes d’argiles expansées avec le fond du pot qui trempe en permanence dans une solution diluée d’engrais : La solution d’engrais monte doucement par capillarité dans les billes d’argile. De ce fait, la plante est alimentée en continu en eau et en engrais. 

 Mais quel intérêt me direz vous ? 

Et bien d’une part, la fréquence des arrosages n’a plus aucune importance lorsqu'on utilise cette technique de culture. Le substrat étant non-décomposable et très aéré de part la grande taille des particules, il peut rester légèrement humide en tout temps. Les poches d'air entre les billes d'argiles permettent une oxygénation optimale des racines de l'orchidée, et ce même si les billes sont légèrement humides en surface. Toute l’eau en surplus se retrouve dans la soucoupe ou le réservoir au pied de la plante et remonte par capillarité dans le pot à la demande. Les racines quant à elles ont un accès permanent à l'eau, à l'air et à l’engrais ce qui permet à l'orchidée de se développer de façon optimale si les autres conditions de culture le permettent. 

Enfin, plus de problèmes d’arrosage pendant les vacances : la plante a sa réserve d’eau qui peut lui durer plusieurs semaines pourvu que la soucoupe (ou la réserve du pot) soit suffisamment grande. Si vous n’êtes pas convaincus, essayez le à la maison : les plantes vertes cultivées de cette manière sont en bien meilleure santé que celle cultivées dans du sol.

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Mais quel rapport avec les orchidées ?


Et bien figurez vous que les orchidées se prêtent particulièrement bien à ce mode de culture. Et si on y réfléchit bien, c’est assez logique. En hydroculture, un gradient d’humidité s’établit dans le pot : le fond du pot est à 100 % d’humidité, alors que la surface du pot est sèche puisque l’eau s’évapore en permanence par le haut. Entre les deux, les billes d’argile sont tout juste humides mais pas détrempées. Comme le substrat est très aéré, c’est en fait comme si les racines étaient soumises à une très forte humidité ambiante. Mais elles ne sont jamais en contact avec de l’eau en tant que tel. Juste à la vapeur d’eau qui s’évapore des billes.

 Conclusion : les racines sont dans des conditions idéales et la pourriture est presque complètement impossible. Aux états unis et au Canada, de plus en plus d’orchidophiles sont conquis chaque jour par cette technique. Et moi qui vous écrit du Québec, je suis bien sur une convertie. Je pratique l’hydroculture depuis 1 an maintenant, et j‘en suis très satisfaite. Voilà pourquoi je veux partager cette expérience avec vous. Ce n’est certes pas une méthode miracle, mais je crois que ça vaut le coup d’essayer.

Alors, je vous explique ?  

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La technique


Tout ce qu’il vous faut pour vous lancer en hydro-culture c’est : un phalaenopsis en pleine croissance en train de faire des racines, des billes d’argile expansées, un pot plus haut que large et un bon engrais complet. Ah oui, et de l’eau aussi !

 Tout d’abord les billes d’argile expansées : il en existe de différentes qualité et grosseur. Les puristes ont leur marque préférées et utilisent différente grosseur pour chaque espèce d’orchidée, en fonction de la grosseur des racines. Pour simplifier je vous dirais de prendre les billes que vous trouvez dans votre jardinerie. L’important, c’est de bien les laver à grande eau avant usage, jusqu'à ce que l’eau qui coule soit claire.

Ensuite le pot : il doit être plus haut que large. En effet la plante doit pouvoir être plantée suffisamment haut pour que les racines ne trempent pas dans l’eau en bas. L’idéal est que la hauteur corresponde à environ 1,25 fois la largeur du pot (par exemple mes pots font 15 cm de haut pour un diamètre de 12 cm). 
Tant que ce ratio est conservé, la largeur en tant que telle a moins d’importance que dans le cas du substrat d’écorce, c’est à dire qu’on peut comparativement utiliser des pots plus gros en hydroponique sans risque de sur arrosage. 

Pour débuter, je vous conseille un pot transparent pour que vous puissiez constater l’évolution de la situation. Moi j’utilise des pots qu’on trouve en grande surface au comptoir à olive ou au rayon traiteur dans lesquels je perce quelques trous au fond (oui oui, les pots transparents dans lequel on vous vend la choucroute… j’espère que vous aimez la choucroute avec le nombre de pot dont vous allez avoir besoin !)

Maintenant la plante : Je vous conseille un phalae pour commencer. C’est une espèce d’orchidée qui se plait particulièrement en hydroculture. Mais vous pouvez essayer n’importe quelle autre type d’orchidée en croissance que vous avez sous la main. Il faut que des racines commencent tout juste à pointer leur nez.  

 Enfin, l’engrais : Il faut un bon engrais complet avec des micro nutriments. Comme le substrat ne contient aucun élément nutritif, l’engrais doit être de bonne qualité. Vous l’utiliserez en permanence au quart de la dose prescrite (soit environ 1 g par litre d’eau pour de l'engrais 20-20-20).

 Comment on fait : Et bien commencez par mettre des billes humides dans le pot jusqu'à demi hauteur. Ensuite dépotez votre plante et débarrassez la de tout le vieux substrat et des racines mortes. Placez la plante dans le pot en maintenant le collet à 2 ou 3 cm du haut et rajoutez le reste des billes autour des racines par couches. Tapotez régulièrement pour tasser. Et voila, il ne vous reste plus qu’à placer votre pot dans une soucoupe ou n’importe quel récipient étanche (par exemple un cache pot non troué) et d’arroser par le haut jusqu’à ce que 2 cm du fond du pot trempe dans la solution d’engrais dilué. 

 

 

 

 

 

Exemple d'un Potinara mis en hydroculture il y a un mois (un peu bas dans le pot... mais faites ce que je dis et pas ce que je fais !)

 Phragmipédium en hydroculture depuis un an 

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Les avantages de l’hydroculture


On en a déjà parlé un peu plus haut. D’une part, il est impossible de trop arroser. La plante a toujours la quantité optimale d’eau et d’engrais, même si on abuse un peu de l'arrosoir (mea culpa !). 

De plus la procédure d'arrosage est considérablement simplifiée: plus besoin d'amener chaque plante jusqu'à l'évier: il suffit de rajouter de la solution par le haut et le tour est joué.

Deuxièmement, l’apport d’engrais est continu, donc la croissance aussi. 

Un autre avantage: le substrat ne se décompose pas. Comme en plus on peut placer l'orchidée dans un grand pot, cela veut dire que la fréquence des rempotages diminue considérablement. De plus on endommage beaucoup moins les racines de la plante lors des rempotages car on conserve intacte la motte déjà formée: l'amas  racines /  billes est tout simplement placé dans le pot plus grand et on complète autour avec des nouvelles billes.

 

 Avantage non négligeable, on peut partir en vacances tranquille : les orchidées s’arrosent toutes seules pendant notre absence. Au pire on peut juste demander à la voisine de venir remplir les soucoupes de temps en temps. Ou encore on peut les poser dans la baignoire avec 2 cm d'eau au fond: elles tiendront facilement 1 mois

Un autre plus : cette technique augmente l’humidité locale autour de la plante. 

Ces facteurs réunis font que la santé globale de la plante est vraiment améliorée. Mais j’en parlerais en détails plus bas. 

Autre chose: les billes sont réutilisables. Je les rince d'abord abondamment à l'eau claire, ensuite je les fais tremper 12 h dans une solution d'eau de javel 10% + savon (à couvert, c'est l'étape de désinfection), ensuite rinçage abondant à l'eau, faire tremper 12 h dans eau acidifiée à pH 4 + savon (à découvert - cette étape élimine les résidus de javel + dépôts de calcaire éventuels), rinçage abondant à l'eau, trempage final 12h dans engrais habituel à pH 6 + savon, égouttage et voila elles sont comme neuves.

 

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Désavantages de l’hydroculture


Et oui, il y en a ! Je n’ai pas dit que cette technique était la panacée ! 

D’une part, il me faut vous parler de la période d’adaptation à l’hydroculture. Lorsqu’une orchidée a été cultivée en conditions sèches avant le passage sur billes d'argile, les racines ont parfois du mal à s’adapter à l’hydroculture où elles sont soumises à presque 100% d’humidité ambiante. En conséquence, un proportion non négligeables des anciennes racines peut mourir dans le mois suivant le passage aux billes d’argiles. Ceci est sans conséquence si votre plante développe rapidement des nouvelles racines qui elles seront parfaitement adaptées à la culture sur billes. 

En ce qui me concerne, je n’ai constaté ce problème d’adaptation que chez les cattleyas et apparentés. Les Phalaenopsis, Oncidiums, Brassias, Phragmipedium, Paphiopedilum se sont tous adaptés sans aucun problème dans les billes. Dans tous les cas, le moment choisit pour passer en hydroculture est très important : il faut le faire lorsque la plante commence à partir des nouvelles racines et uniquement si la plante n’est pas en fleur. Comme ça on est sur que les nouvelles racines pourront prendre la relève au cas ou les anciennes auraient des problèmes d’adaptation. 

La technique est plus délicate avec les très jeunes plantes. La période d'adaptation est alors critique. Pour débuter, choisissez donc des plantes adultes et en bonne santé

 

On voit ici les nouvelles racines du Potinara qui commencent à coloniser les billes d'argile

 Un autre problème de l’hydroculture : il est parfois difficile de trouver des pots répondant au ratio hauteur / largeur (surtout des gros), et des fois j’en ai un peu marre de manger de la choucroute (;-p). 

Les caches pots doivent aussi être plus hauts que d’habitude. Et certain trouvent les billes inesthétiques. 

Autre chose les billes d’argile coûtent plus cher que le substrat d'écorce. Par contre elles sont réutilisables, donc ça compense. Notons quand même que ces #$$R%^% de billes ont une fâcheuse tendance à rouler partout, ce qui est particulièrement frustrant !  

 

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Les résultats


Ils se passent de commentaires. Sur mon oncidium, les nouveaux pseudo-bulbes obtenus en hydroculture sont 2 fois plus gros que ceux obtenus sur écorce (qui étaient pourtant adultes). Pour les phalaes, floraison sur floraison. Et bien sur, plus de fleurs par hampe.

 

ici, un oncidium. A gauche le pseudo-bulbe élevé aux écorces, à droite celui qui a mangé de la bille d'argile.

 

Les racines de ce même oncidium... le bas est bleu car mon engrais est bleu !

Même chose, vue de dessous...

Détails et autres photos concernant cet oncidium

 

Et je ne suis pas la seule à avoir constaté des résultats spectaculaires. Allez visiter ces sites pour vous en convaincre (textes en anglais, mais photos très explicites par elles mêmes).

http://www.nhm.org/guana/tz-webpg/semihydr.htm 

http://www.growinhydro.com/

http://www.firstrays.com/semi-hydro.htm 

Il existe même un forum réservé uniquement à l’hydroculture des orchidées :http://www.firstrays.com/wwwboard/wwwboard.shtml 

  

  

Alors, convaincus ? Et si vous essayiez pour voir ? 

Laurence,  le  26 jan. 2003

Aller à la suite: Orchidée et hydroculture suite

Voir des photos de mes orchidées en hydroculture

 


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